domingo, 22 de novembro de 2009

I cento cavalieri e Europa '51 poderiam muito bem se chamar Todo Pensamento Emite um Lance de Dados.

terça-feira, 10 de novembro de 2009

CINQ POINTS DE RUPTURE



« Puisqu'elle est trangressive, toute aberration doit être tenue, à l'inverse, comme émergence possible d'un autre système »
(Ricardou - « L'Or du Scarabée »).

« The Shooting », « L'Ouragan de la vengeance » dérivent d'un genre, le Western, ensemble de formes rythmiques codées promotrices d'une efficacité qui parle, tout en la refoulant, l'artificialité d'un mythe, dès lors vraisemblable, « naturel ». Ce code est régisseur de distributions constantes, entérinées par une longue complicité du tandem spectateur-créateur: le couple manichéiste Bien-Mal réparti selon les règles du jeu capitaliste.

C'est cette statique qui est remise en cause par Monte Hellman, donc l'idéologie qu'elle sous-tend consciemment ou non. Il n'est sans doute ni le premier ni le seul à procéder ainsi. Quoiqu'il en soit, cette crise, sinon l'annonce d'une véritable mutation, est en tout cas le symptôme d'une rupture.

Ce retournement n'est en rien un quelconque pastiche de genre (Mekas, ou « Spaghetti western ») qui, tout en l'inversant, participe du système qu'il distancie. Le changement d'axes opéré ici est lié au contraire à un changement d'écriture radical, qui touche en premier lieu aux fonctions de la durée. La notion de « réalisme » n'en est pas pour autant intentionnellement mise en cause (continuité - homogénéité apparente du temps; continuité des personnages par leurs motivations). Elle semble plutôt rectifiée; réimposée souverainement, purifiée des techniques instituant le western standard.

1) Le temps. Forcené. Bloc sans failles, lisse et continu. Lenteur accumulée jusqu'à l'éblouissement. Ni à-coups dramatiques, ni ruptures de tempo, ni répartition des plans en vue d'une efficience.

A l'opposé, cette persistance fascinée paraît se reproduire sans intervention d'aucune sorte, absolument seule à partir d'un centre incertain qui la diffuse et fait surgir en creux l'élan, obstiné comme elle, des motifs sur l'image. Après un quart d'heure, vingt minutes, de projection, l'espace devenu secondaire, perd de sa matérialité, de sa définition. L'image étant désormais moins une configuration déterminée que le lieu de cette force, là, sous elle, qui l'aligne. Le film, miné par cette pulsion « quelque part en dessous », par cet immense silence progressivement tendu, substitué à sa composition, perd toute stabilité et verse très vite, pour peu qu'on s'y laisse emporter, dans l'hallucinatoire.

Frustré de la stupéfaction calculée du western traditionnel, le lecteur reste libre, même déçu, irrité par ce temps qui casse le discours convenu. Il vit désormais une durée analogue à celle, lancinante, de son pouls, passivement éprouvée. Ainsi deux effets:

Le « réalisme » des deux films, après sublimation des procédés de tradition, échappe à toute pertinence. Le temps filmique, par excès de statisme, finit par indiquer son existence propre, et jusqu'à l'asphyxie.

Mais surtout ce langage neuf fait ressortir, par différence, la syntaxe institutionnelle du western et par contrecoup, parce que c'est la même chose, du film hollywoodien. Le code de naguère se démasquant - sinon s'explicitant - lorsque ses thèmes sont décodés à travers une nouvelle grille.

2) Le lieu. De ce fait, inévitable, un type original de lieu, sans rapport avec les images du western d'Epinal. Une enceinte synthétique, d'indétermination croissante, non pas signalée comme réalité artificielle mais déjà considérée comme contour arbitraire.

Des montagnes, le soleil, une cahute, des pistes, tout cela sans dénomination (celles-ci, conservées lorsque absolument nécessaires au récit, prennent de par la pénurie de signes, une dimension quasi mythique). Lieux du Tout et du Rien, fondamentaux, et qui se refusent à toute perspective anecdotique. Centres de réception flous où le mythe révèle à la fois la rigueur de son armature et l'imprécision de ses données.

3) Personnages. Les personnages de « The Shooting », de « L'Ouragan de la vengeance » parcourent un tracé, suivent une direction, dont les pulsions ne sont jamais justifiées - formulées par des motivations, morales ou autres. Les personnages, ces figures d'ombre qu'ils dessinent, vont on ne sait où, viennent d'on ne sait où, s'arrêtent on ne sait pourquoi, un point c'est tout.

Ce qui est révélé ici, c'est moins le sens de leurs conduites que, là encore, la force, point central et vecteur, « abstraction sensible », forces diversifiées, combinées en jeux multiples (par exemple sexualité - entre Millie Perkins et les trois hommes dans « The Shooting »; ou fuite en avant perpétuelle dans le temps, incontrôlable, dans « L'Ouragan de la vengeance »). Forces en tout cas qui, contrairement à la « mise en scène » toujours productrice d'une symbolique de « caractères » (et l'on sait aujourd'hui à quel type de culture appartiennent ces dénominations), sont à lire dans leur litteralité stricte de mouvements. Blocs compacts et totalisants, centres à la fois vides et pleins, personnels et impersonnels des corps. Profondeur sourde, informulée (avant la formulation) établie textuellement et matériellement, sans « mystères », sur l'écran.

4) Lecture. Le western, traditionnellement, animait des figures de base (cow-boy, tueur à gages, sheriff) à la crédibilité fondée sur une personnalisation psychologique complémentaire (anecdote, antécédents sociaux, etc.), dispensée par le dialogue et la « mise en scène ». Personnalisation situant le personnage filmique nettement en dehors; à l'extérieur de la réalité du lecteur.

Hellman, au contraire, conserve les figures de base, sinon leurs définitions complémentaires, complaisamment estompées. Un dialogue énigmatique, vide de signes. Une gestuelle fonctionnelle sans « expressivité ». L'un comme l'autre laissant ouvertes les grandes structures qui, par contre-coup, changent les perspectives de la lecture. Aucune différence d'ordre biographique n'empêchant plus l'identification, le lecteur n'est ainsi plus maintenu à l'extérieur, il pénètre dans le film, le vit en même temps qu'il se vit, s'y incarne en échos à la fois proches et lointains, familiers mais toutefois dissemblables, opaques et, cependant, clairs.

5) Le tout. Alors que, dès qu'il se parle selon une caractérisation individualisante et typique, le personnage capte la totalité de l'attention sur l'écran, en s'imposant comme plan unique et « normal » de lecture, il suffit au contraire que toute énonciation psychologique lui soit refusée pour qu'il revienne au niveau du « reste » - accessoires, paysages - et dépasse en la brisant définitivement cette stratégie perceptive alors révélée comme telle. Ainsi en est-il dans les deux films de Monte Hellman où l'acteur n'est plus qu'un poids, questionnant et mouvant en direction, une force parmi d'autres forces, à la fois spécifique et englobée.

Sébastien ROULET

Cahiers du Cinéma n° 205, outubro 1968, pp. 57-58

domingo, 8 de novembro de 2009

LES QUATRE RÈGNES

Puisqu'il s'agit du sujet profond de Two Weeks in Another Town, parlons cinéma. « Tout grand film est un documentaire », écrivait Eric Rohmer. Il entendait par là qu'une oeuvre ne puise sa force que dans la vérité de la description des personnages et du milieu: qu'elle doit nous renseigner parfaitement sur le fonctionnement de celui-ci pour nous apprendre tout sur ceux-là. Le dernier film de Minnelli répond à cette exigence: il peint fidèlement le désarroi de la faune hollywoodienne, arrachée à son cadre naturel, qui doit se plier aux dures lois de l'évolution économique et cherche à maintenir, dans un décor tout autre (« in another town ») une façon de vivre, de sentir, de rêver, ainsi que de concevoir et de réaliser ces films dont elle ne peut, pour son malheur et son aliénation, se détacher. Two Weeks est à la fois un témoignage sur un phénomène très actuel du cinéma américain (cf. notre récent numéro), et sa critique.

Mais il y a plus. Le terme de documentaire évoque immédiatement ces films qui enregistrent objectivement le processus de la vie: vie inorganique des minéraux, organique des vegétaux, animaux, hommes; et aussi cette « vie » mécanique des machines, fabrications humaines. Importe donc, ici, l'idée de transformation de passage d'un état A à un état B, en un mot, d'évolution. La notion d'évolution (bien mieux que celle de mouvement, trop floue, nullement spécifique - la danse - et cause de nombreuses aberrations: cinéma « pur », cinéma-montage) me semble répondre à la nature fondamentale du cinéma. Car, de quelque façon qu'on envisage ce dernier, on ne lui voit qu'un seul objet: la vie. La capter à sa source, trahir son frémissement, en suivre le cours, la saisir au moment de son expiration, telle est la noble et unique mission du documentaire. Elle exige le respect, l'humilité, la compréhension intime et quasi amoureuse de la chose regardée. Elle condamne toutes les spéculations de la chose regardante - l'homme tripatouillant la caméra et la pellicule, et faisant écran à l'écran - qui nient l'Autre pour mieux s'affirmer à ses dépens. Reste, donc, que documentaire et cinéma ne font qu'un.

Où arrivons-nous? A cette constatation: un grand film, fût-il du domaine de la plus pure fiction, ne peut se passer de cet aspect documentaire inhérent à l'art cinématographique. Je dis inhérent, car la solidité documentaire (vérifiée diversement par les sciences) d'oeuvres telles « L'Odyssée », la Bible, les romans de la Table Ronde, ou même « Les Mille et une nuits » et « Don Quichotte » - c'est à dessein que je ne cite que des oeuvres aux héros et actions mythiques - est le plus sûr garant de leur retentissement universel, donc de leur vérité, si l'universalité peut être considérée comme meilleur critère d'une valeur esthétique. Mais qui ne voit pourtant la différence? La littérature, qui doit décrire le réel, transpose pour mieux la restituer, et force l'artiste à inventer la métaphore (cf. « Le Celluloïd et le marbre », d'Eric Rohmer). Le cinéma, lui, enregistre le réel qu'on lui offre à regarder, mais contraint alors l'artiste à se soumettre tout à fait à la chose elle-même et à son devenir: de lui, elle exige simplement qu'il retrouve, d'une façon immédiate et intuitive, la sève qui a formé l'écorce. Le miracle du cinéma, c'est que la caméra filme ce courant mystérieux, ce mouvement intérieur qui a mené la chose à son apparence, à son écorce, dans le temps même où cette écorce semblait constituer une limite infranchissable à l'investigation.

Conséquence: filmer l'homme objectivement implique que le cinéaste saisisse simultanément toutes les étapes de l'évolution jusqu'à l'homme. Tout grand film est d'autant plus un documentaire qu'il est, ensemble, tous les documentaires possibles. Two Weeks le prouve. D'abord, un documentaire sur l'homme. A la fois sur la vie d'une société (qui se reflète dans celle d'un groupe particulier, peint justement dans ses particularités), et sur la vie de la machine sociale, son fonctionnement, sa mécanique, et l'oeuvre que, par le travail, elle contraint l'homme, en lutte avec elle, à produire.

Mais, aussi, documentaire animal, tant il est vrai que tout, dans le comportement physique de l'homme, cet animal supérieur (et cette sorte de documentaire ne peut qu'être concerné par ce comportement physique), ressortit à l'animal. (Tellement qu'il n'est point de grand film à notre connaissance qui ne se puisse transposer tout à fait dans le règne animal). Voyez Two Weeks: depuis le vieux lion déchu qu'est Edward G. Robinson, ou la lionne furieuse, sa femme, en passant par la souple beauté de la panthère qui prend plaisir à déchirer (Cyd Charisse), tous, dans cette jungle, luttent pour conserver intacte leur parcelle de pouvoir, de territoire. Il s'agit bien, en effet, dans le regards, les attitudes, les gestes, les élans et les guets des personnages, de réactions animales. Que la notion de territoire se révèle en fin de compte chimérique et illusoire participe alors du côté supérieur de l'homme: c'est son drame. L'homme, par le biais ici du héros, doit apprendre à accepter son évolution (et l'évolution), donc de se détacher de toutes les étapes antérieures, la plus proche en particulier, l'animale, caractérisée par la volonté de conquête et de possession.

Transposition aussi dans le domaine végétal: les phénomènes de la vie des plantes trouvent leur correspondance en l'homme (en dehors de ce qu'on nomme la vie « végétative »): dans le domaine de l'affectivité. Une affectivité qui, chez Minnelli, dépend du milieu et se nourrit de lui: voyez simplement tous ces êtres déracinés d'Hollywood chercher à demeurer enracinés dans le milieu du cinéma.

Enfin, il semble à peine utile de montrer, tant le décor comme projection des personnages a d'importance ici, comment le documentaire portera aussi sur le côté minéral de l'homme, plomb ou or, acier ou bois pourri. Que les personnages de Two Weeks préfèrent l'inconsistance de leur décor « de cinéma », toiles peintes et carton-pâte, à la pierre somptueusement baroque de la Ville Eternelle (ce baroque étant montré par Minnelli comme le dernier stade d'évolution de cette pierre: son éclatement, image même du violent mouvement intérieur qui agite les personnages), manifeste assez leur faiblesse, apparemment masqueée par leur cruauté: ils ne s'appuient ainsi désespérément que sur un monde imaginaire, sans assises.

Il arrive nécessairement que, parvenu au sommet de sa propre évolution, l'artiste cesse de condenser temporellement ces diverses étapes de l'évolution, pour les étaler dans l'espace. Les quatre règnes se côtoient alors, l'homme y évoluant (Tabu, Hatari!, Le Fleuve), ou apprenant à y évoluer (Le Tigre d'Eschnapur, Sansho Dayu, Home From the Hill) harmonieusement, assumant enfin cette supériorité qui lui est si difficile au départ. Ainsi se trouve abordé le problème temporel de l'évolution: un passé surgi dans un présent, un présent qui s'enforce dans un passé (c'est le cas de Two Weeks). De leur lutte, dépend un avenir qui soit ou non libéré d'entraves et permette à l'homme de s'épanouir. Ce conflit, au niveau d'un scénario, d'un individu, engage le sort de l'humanité. S'il s'agit, pour le héros, de s'arracher à tout ce qui freine son accomplissement, il s'agit parallèlement pour la société de dénoncer une mentalité rigide qui entrave son progrès, et pour l'espèce, de se détacher enfin des espèces antérieures dont elle est issue. Ainsi Kirk Douglas, en même temps qu'il exorcise son passé, dénonce une société (aussi bien celle qui fabrique le produit cinématographique que celle qui le consomme) attachée à une conception de l'homme et de l'art périmée, et offre de la sorte, par son « sacrifice », une ouverture à l'humanité.

Il faut, à ce problème temporel de l'évolution, une solution évidemment spatiale. Le mouvement qui, au cinéma, rend, à travers le biais du trajet et de l'itinéraire, le processus de transformation des êtres et des choses évoluant sous nos yeux, se heurte toujours à la fixité. Il ne suffit pas que Kirk Douglas réintroduise le mouvement (un mouvement baroque accordé à Rome, qu'il est le seul à avoir pénétrée) dans la mise en scène du film qu'il reprend en cours de tournage pour résoudre son propre problème. Ce n'est là qu'un palliatif. Il lui faut encore remonter complètement en lui-même, aller au bout de cette fixité qui l'obsède (et dont sa femme est moins l'objet que le prétexte, la fixation); il lui faut redécouvrir sa véritable aspiration: le refus de vivre, la mort. Il y touche quand sa femme, au cours de la réunion de drogués, se faisant entraîneuse pour mieux l'entraîner, l'abandonne. Ne peut alors le libérer de son passé et de la tentation de l'immobilité que sa course folle en voiture, mouvement excessif, flux de vie par lequel le rêve pernicieux sera à son tour entraîné et détruit. Désormais maître du mouvement, il boucle son itinéraire d'Hollywood à Hollywood et fonde son devenir, avec, dans son sillage, celui des autres (le jeune acteur), qui est le nôtre.

Nul ne s'étonnera plus que ce cinéma documentaire (le seul que nous aimions), fasse alors, au-delà de ses tourments, l'éloge de la folie. Tel est le sort de l'homme aujourd'hui: s'arracher à l'acquis de l'individu, de la société, de l'espèce même, pour affronter un avenir qui ne semble tellement angoissant que parce qu'il recèle (peut-être) les plus étonnantes promesses quant à l'évolution de l'homme. Tout grand film est ce documentaire sur le courage et la grandeur de la folie, de la sagesse humaine.

Jean DOUCHET

Cahiers du Cinéma n° 154, abril 1964, pp. 65-68

quinta-feira, 5 de novembro de 2009

(...) Crônica de Anna Magdalena Bach poderia ter existido já no primeiro minuto após a criação do cinematógrafo. Talvez a verdadeira modernidade seja a eterna capacidade de recomeçar, de recuperar o impulso original de uma arte em qualquer época da sua história.

(pode-se retorquir que os Lumière e seus operadores não podiam filmar, e aliás não filmaram, a música; mas pode-se retorquir igualmente que podiam filmar, e filmaram, musicalmente, e foi o que fizeram com essa fila de camelos, como Straub fez com a vida de Bach)

quarta-feira, 4 de novembro de 2009

Até aqui o melhor Manoel da década.

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